La prochaine année sera certainement le théâtre de beaucoup d’occasion de photographier les aurores boréales. Après le spectacle complètement hallucinant que nous avons eu le 10 mai dernier, j’ai décidé de monter l’article suivant pour vous aider à photographier ce phénomène si majestueux.
D’emblée, je vous invite à consulter l’article que j’ai rédigé il y a quelques années déjà qui vous explique comment observer les aurores boréales. Avant même de vouloir et pouvoir photographier un phénomène, il faut être capable de l’observer. Si je veux résumer ce dernier en quelques mots :
Il faut trouver un ciel relativement libre de pollution lumineuse
Regarder au Nord
Laisser ses yeux s’habituer à la noirceur
Avoir les bonnes conditions météo
Avoir une activité sur le soleil
LE MATÉRIEL
Donc vous avez toutes les conditions favorables à l’observation des aurores boréales et vous désirez maintenant les photographier. Débutons donc avec le matériel. La plupart des équipements modernes de photographie peuvent faire le travail pour immortaliser les aurores. Même un téléphone avec les dernières technologies peut le faire. La qualité peut évidemment varier, mais avec pratiquement tous les équipements, on peut arriver à les capter.
Ensuite, tout dépend de la qualité des photos que l’on désire prendre. Si vous désirez capter de belles images, il vous faudra :
Un boitier avec une bonne montée en ISO (idéalement avec un capteur plein format)
Un objectif grand-angle lumineux (entre 14mm et 30mm, f2.8 ou plus grand)
Un trépied stable
Une télécommande (facultatif)
Des batteries supplémentaires
Lampe frontale
S’INSTALLER
Vous avez de bonnes conditions, vous avez le matériel. On allume sa lampe frontale et il est maintenant temps de vous installer pour capturer vos photographies.
La première étape est de bien régler son trépied. Élément clé à ne pas négliger car l’ensemble de la prise de vue repose sur cet équipement. Évaluez d’abord le sol sur lequel vous désirez vous installer. S’il est mou ou sablonneux, pensez à mettre des sous-verres ou de petits blocs de bois pour agrandir la surface de contact avec le sol et éviter que le trépied bouge ou s’enfonce. Extensionnez d’abord les sections de pattes les plus basses, pour ensuite utiliser celles plus hautes pour une meilleure maniabilité et éviter que le sable ou la terre entre dans vos twist-locks. Évitez le plus possible d’extensionner la colonne centrale. Vous gagnerez beaucoup en stabilité si vous ne l’utilisez pas.
Deuxième étape, on installe le boitier sur le trépied au moyen de la plaque de monture. Si vous désirez capter des images verticales, pensez à acheter une bracket en L pour une meilleure stabilité et une plus grande maniabilité du boitier sur le trépied. Assurez-vous que le boitier est bien fixé solidement. Dans la noirceur, il est facile serrer la plaque sans que le boitier soit bien inséré et qu’un accident survienne.
Troisième étape, on allume le boitier et on règle la luminosité de l’écran pour que ce dernier ne soit pas aveuglant ni dérangeant. Si vous utilisez le retardateur de votre boitier (nous en parlerons plus tard), cachez la petite lumière qui clignote avec un bout de gaffer tape (qui ne laisse pas de colle). Si vous êtes plusieurs ensemble à photographier, vous apprécierez tous de ne pas voir de lumière verte ou orange qui éclaire votre avant-plan.
LES RÉGLAGES
Vous êtes bien installé, vous avez les aurores au ciel et il est maintenant temps de régler le boitier. Pour ce faire, nous allons devoir d’abord régler les trois paramètres du triangle d’exposition.
L’ouverture : Vous allez utiliser, à moins d’avis contraire, l’ouverture la plus grande disponible. Si votre objectif ouvre à f3.5 ou f4, utilisez celle-ci. Si vous avez un objectif lumineux, ouvrez à f2.8 ou encore mieux à f1.8. Plus grande est l’ouverture, plus il y aura de lumière qui frappe le capteur. Et dans le cas précis de la photographie d’étoiles, et encore plus particulièrement dans la photographie d’aurores boréales, c’est un facteur déterminant dans la qualité d’image finale.
La vitesse : Le temps d’exposition sera déterminé par la vitesse à laquelle l’aurore boréale bouge. Vous verrez dans le ciel des mouvements. Parfois, ils sont lents. Parfois, ils sont rapides. Optez pour une vitesse plus lente (entre 5 et 10 secondes) lorsque les mouvements sont lents et pour une vitesse plus rapide (entre 1 et 5 secondes) lorsque les mouvements sont rapides.
La vitesse rapide vous permettra de bien figer les mouvements de l’aurore :
Les piliers : bandes verticales lumineuses
Phase active : lorsque les aurores « dansent » dans le ciel
L’aurore coronale : convergences du mouvement au-dessus de votre tête
La vitesse lente vous permettra de bien capter les moments où l’aurore bouge peu, comme les arcs diffus.
La sensibilité : Votre valeur de ISO ira en fonction de vos 2 autres paramètres. Si vous utilisez une vitesse rapide (moins de lumière sur le capteur) et/ou si vous utilisez une valeur d’ouverture grande (F grand, moins de lumière sur le capteur), vous devrez augmenter la sensibilité du capteur pour palier au manque de lumière. Il n’est pas rare d’utiliser des valeurs de 6400 ou 12800 iso pour aller chercher la bonne exposition. Au contraire, si vous utilisez un temps d’exposition plus long (plus de lumière sur le capteur) et/ou si vous utilisez une grande ouverture (plus de lumière sur le capteur), vous pourrez utiliser une valeur de sensibilité plus basse comme 800 ou 1600 iso. Vous gagnerez alors en qualité d’image, en gamme dynamique et en quantité de bruit (moins de bruit).
LA MISE AU POINT
Vous avez installé vos équipements, vos réglages sont bien paramétrés, il ne reste plus qu’à faire la mise au point avant de déclencher. C’est d’ailleurs la portion la plus importante et la plus souvent négligée.
Première étape, calculez l’hyperfocale. L’hyperfocale est la distance à laquelle la zone de netteté débute lorsque la mise au point est placée sur l’infini. Ici, l’infini est le bon endroit où faire la mise au point pour avoir nos étoiles (et l’aurore boréale) bien nettes. Vous pouvez calculer cette distance avec une application comme PhotoPills ou TPE. Cette valeur représentera la distance à l’intérieur de laquelle il ne faut pas placer de sujet. Par exemple, si l’hyperfocale est de 3m, il ne faut pas placer de sujet à moins de 3m de distance car il sera flou.
Une fois la distance calculée, on affiche l’image sur l’écran arrière du boitier. On place l’objectif ET le boitier (pour éviter les surprises) en mode de mise au point manuelle. On désactive la stabilisation sur l’objectif ET sur le boitier. La stabilisation, lorsque nous sommes sur trépied, induit un mouvement au lieu de l’annuler.
Si vous utilisez un objectif très lumineux (f1.8 ou f1.4), vous verrez à l’écran les étoiles les plus lumineuses. Pointez l’appareil sur l’une d’elles autour du centre de l’image, agrandissez l’image au maximum avec la petite loupe et tournez la bague de focus jusqu’à ce que l’étoile soit nette.
Si vous utilisez un objectif peu lumineux (f4 ou plus), vous aurez de la difficulté à voir les étoiles à l’écran. Pointez alors l’objectif vers une source lumineuse (un lampadaire de rue par exemple). Agrandissez l’image avec la loupe et tourner la bague de mise au point jusqu’à ce que l’élément soit net. S’il n’y a aucun élément lumineux à proximité, laisser l’appareil en place et aller porter une lampe quelconque à une grande distance qui se rapproche de l’infini (au grand-angle, entre 15 et 20m est suffisant). Retournez à votre appareil et pointez ce dernier vers la lampe que vous avez placé pour faire la mise au point.
DERNIERS RÉGLAGES ET TESTS
Vous êtes presque prêt à faire votre première photo test. Activez le retardateur de 2 secondes (ou utilisez une télécommande). Vous éviterez ainsi le flou de bouger induit sur l’appareil. Appuyez sur le déclencheur et vérifiez les points suivants :
Mise au point juste et nette
Exposition bonne
Vitesse adéquate avec la situation
Une fois la mise au point réglée, vous pouvez placer un bout de gaffer tape pour fixer la bague de mise au point pour éviter qu’elle ne se dérègle. Notez que si vous changez de focale sur votre zoom, il vous faudra valider la mise au point à chaque changement. Cette dernière peut bouger lors de la manipulation.
CADRAGE
Une fois votre photo test effectuée et validée, vous pouvez maintenant cadrer votre image au même titre qu’une photographie de paysage standard. Un avant-plan intéressant, des lignes directrices, la règle des tiers, cadrer au centre pour une réflexion, tous des éléments cruciaux de la photographie de paysage que l’on doit aussi prendre en compte en paysages de nuit. Répétez ensuite l’exercice!
Au courant de la nuit, vous pourrez photographier différentes phases de l’aurore boréale. Vous pourrez également photographier différentes couleurs (bleue, rouge, mauve, verte) et formes.
Les piliers, bandes lumineuses verticales qui peuvent s’étendre de l’horizon jusqu’au zénith. Ils peuvent venir en groupe ou seul.
L’arc auroral, bande horizontale en forme d’arc qui peut s’étend généralement autour du Nord, mais sans s’y limiter.
L’aurore coronale, point de convergence des rayons situé au zénith.
Steve, cette nouvelle appellation pour décrire une forme d’aurore qui ressemble à un panache de fumée colorée qui part de l’horizon à l'ouest pour monter vers le zénith.
La photographie de nuit, et plus particulièrement d’aurores boréales, requiert patience et persévérance. Terminé l’instantanéité, il faut attendre plusieurs secondes avant de voir le résultat et avant de voir si tous nos réglages ont bien été paramétrés (vous me direz que nous sommes loin de l’ère du film 35mm, je le concède). Il faut beaucoup de pratique, d’essais et d’erreurs, mais si on se donne la peine, le résultat peut être vraiment réussi. Chaque seconde est différente de la précédente. On peut photographier le phénomène durant toute la nuit sans avoir aucune image semblable.
Bonne photo!
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